Nature L’avenir des océans ou l’emploi ?

Aujourd’hui a lieu, au Parlement Européen un vote concernant le chalutage profond. J’ai déjà signé une pétition pour interdire cette pratique, ultra subventionnée, et incroyablement destructrice pour les fonds marins ; si vous voulez la signer et apprendre pourquoi c’est une mauvaise chose, vous avez la pétition ici, et une BD marrante qui explique pourquoi c’est une aberration écologique et économique ici.

Ce matin, sur France Info, passait un reportage sur le sujet, annonçant que le journaliste avait rencontré des opposants et des partisans de la technique. Je connaissais déjà les arguments des opposants, mais j’étais curieuse de voir comment on pouvait trouver des arguments pour défendre une technique qui revient, grosso modo, à racler a la pelleteuse les fonds marins pour ne garder que 3 espèces de poissons, et rejeter le reste, mort bien entendu, y compris des coraux millénaires…

Sans surprise, les partisans sont des pêcheurs. Et sans grosse surprise non plus, leur argumentaire tiens en 2 points :

  • les écologistes, ils exagèrent toujours, des poissons, y en a plein la mer !
  • et puis d abord, y a plein de gens employés a faire ça, si on interdit cette technique ça va détruire au moins 3000 emplois !

Je passerais sur le 1er argument, qui tient a la foi de la politique de l’autruche, de la méthode Coué et de la croyance au père Noël : si je nie le problème et ferme les yeux très fort, les poissons ne disparaitront jamais. Ce qui m’énerve plus, c’est le second argument, l’emploi, que je trouve a la fois stupide et dénotant une triste vision du monde, nombriliste et a très court terme. Je ne sais pas si c’est typiquement français, ou juste une technique classique pour effrayer les gens en temps de crise, pour les amener a penser “c’est vrai, il y a déjà beaucoup de chômage, tant pis, ne faisons rien”, mais oser opposer l’emploi a toute volonté de changement me parait la meilleure solution pour qu’une société stagne.

Vous imaginez, si on avait interdit les emails, au motif que ça allait couler le fax, et donc faire perdre des emplois ? Ou l’automobile, au motif que les conducteurs de calèche allaient perdre leur poste ? Plus loin dans l’histoire, vous imaginez : “Abolir l’esclavage, mais vous n’y pensez pas ? J’ai 3000 négriers qui vont se retrouver au chômage, mon bon monsieur !”

Cet argument revient a dire que si une branche a des emplois, elle est sacro-sainte, on ne peut rien faire qui risquerait d’induire des changements. Selon ce genre de raisonnement, si les voitures électriques font une percée, il faudra se battre contre, car cela impactera les emplois de la filière pétrole et automobile actuelles. Le progrès, la planète, on les emmerde. L’important, c’est une poignée d’emploi, là, tout de suite. Et tant pis s’ils sont condamnés de toute manière.

Évidemment, je ne dis pas que pour les gens concernés, ce n’est pas important. Mais il y en a toujours eu, des progrès qui impactent des emplois, et il y en aura toujours. Cet argument revient non seulement à nier cela, mais sous entend également que si UN type de pêche est interdit, les pêcheurs le pratiquant seront immédiatement sans ressources. Comme s’ils ne pouvaient pas changer leurs pratiques, pêcher autrement…

Dans l’histoire, le plus triste avec une vision “court-termiste” comme ça, c’est que si on ne fait rien, et qu’ils détruisent vraiment la ressource, ces emplois auxquels ils tenaient soit-disant tellement seront de toutes façons détruits. En gros, c’est reculer pour mieux sauter…

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